J28 – Mardi 28 octobre 2014 – Journée Plage (s) à Kuta (Lombok)
C'est l'histoire d'un consultant qui passe ses vacances à Kuta et qui sympathise avec un pêcheur, qui chaque jour revient en fin de matinée avec son prahu et deux ou trois mahé-mahé, une espèce de gros poissons. Le pêcheur lui explique qu'il pèche 2 heures par jour, puis qu'il va vendre ses 2 mahé-mahé à un restaurant. Avec l'argent, j'achète des bières. Je fais la sieste puis je passe l'après-midi à boire mes bières et à jouer de la guitare avec mes copains.
Un cerveau de consultant ne reste jamais au repos, c'est d'ailleurs l'un de ses principaux travers.
Il sort sa calculette et explique au pêcheur. Si tu travaillais 8 heures par jour, tu pourrais pécher 8 mahé-mahé. Tu mets l'argent de coté. En deux mois, tu peux acheter un bateau à moteur et un filet. Deux mois de plus et tu peux acheter 2 nouveaux bateaux et embaucher 2 de tes copains. Avant un an, et moyennant un petit emprunt, tu peux faire construire une usine de traitement de poissons et vendre les mahé-mahés non seulement aux restaurateurs, mais aussi à travers le pays. En 3 ans, tu es à la tête d'une petite flottille et d'une usine ultra-moderne. Tu installes tes bureaux à Singapour et tu reproduis ton système , en Malaisie et aux Philippines. Et en 10 ans, tu es riche, très riche.
Et alors demande le pêcheur ?
Alors, s'enflamme le consultant, alors tu fais tout ce dont tu as envie. Si tu étais riche, qu'est-ce que tu aurais envie de faire ?
Moi si j'étais riche, je viendrais à Kuta. J'achèterais un prahu et j'irais pécher tous les matins 2 mahé-mahé que j'irai vendre aux restaurants. Avec l'argent j'achèterais des bières. Je ferais la sieste puis j'irais jouer de la guitare et boire mes bières avec les copains...
Ben voilà, cette histoire résume assez bien la situation ici. Les sasaks (habitants de Lombok) du sud ont échappé de justesse à l'industrialisation touristique de leur territoire. De justesse car, dans les années 90, les fils du Président Suharto avaient conçu un projet touristique gigantesque avec comme clé du système l'achat des terrains aux paysans à 30.000 roupies l'are (2 €) et la revente à des consortiums étrangers 5 millions de roupies l'are (166 € !!!). Le projet a avorté du fait de la crise économique de 98, de la déroute du clan Suharto et des attentats de Bali de 2003 et 2006. Mais il reste en témoignage de ce projet fou, des routes superbes et des rond-points superbement inutiles et … et … un Novotel, ouvert en 97 par le groupe Accor ! Curieusement, nous ne sommes jamais les derniers dès qu'il y a un plan foireux quelque part...
Bref, nous passons la matinée à comparer les plages de l'ouest, à regarder les pêcheurs pêcher et les surfeurs surfer. Car il y a bien quelques touristes australiens, sur certaines plages. Une petite poignée … Une pensée pour Guillaume et Nolimé ; mais les spots semblent plus adaptés aux surfeurs débutants.
La morale de l'histoire : Convaincu, le consultant acheta son propre prahu … et se garda bien de pêcher plus de 2 mahé-mahés par jour !